La colère de l'enfant, une émotion parmi d'autres

Les émotions sont l’essence même de l’existence, le mouvement de la vie intérieure :

  • E= vers l’extérieur
  • motion= mouvement

Exprimer son émotion permet de libérer les tensions pour se recentrer et redevenir soi : l’ex-pression est en effet l’opposé de la -pression dans laquelle l’impossibilité de dire enferme l’énergie vitale.

La colère est un sentiment sou­vent méconnu, mal jugé, mal compris, très souvent assimilé à l’agressivité et la vio­lence.

Contre la violence : faire le choix d’une colère exprimée

La violence qui cherche la destruction de l’autre survient lorsque la colère n’est pas gérée.  La colère parle de soi et de ses propres besoins, elle ne cherche pas à détruire l’autre.

La colère entraîne une réaction physiologique de l’organisme car elle est l’expression de ce qui est vécu comme intolérable pour soi, l’expression saine d’un besoin. Elle permet de faire face à la frustration et rétablir l’harmonie sans être détruit par une souffrance. Le déroulement des processus avant l’acceptation est d’ailleurs bien connu : déni-colère-négociation-tristesse-acceptation.

L’origine de la colère chez l’enfant

La prévention est parfois préférable :

  • anticiper en prévenant l’enfant,
  • soustraire les objets convoités,
  • donner des choix,
  • instaurer des rituels rassurants,
  • détourner l’attention de l’enfant vers des tâches adaptées et valorisantes,
  • éviter les crises souvent liées à des besoins physiologiques tels que la fatigue ou la faim…

L’enfant est dans l’immédiateté de sa réponse émotionnelle car il n’a pas la médiation de la pensée pour relativiser les choses ou hiérarchiser les enjeux. Il est dans l’instant présent : quand vous lui dites « après », ou « plus tard », cela n’a aucun sens pour lui, il ne peut le comprendre !

L’écoute des émotions n’implique pas systématiquement la satisfaction des demandes. Lorsque l’enfant s’extasie devant un jouet, il ne vous dit pas forcément « je veux ce jouet » ! En parler peut-être suffisant pour le satisfaire. Et si tel n’est pas le cas, il est essentiel de permettre à l’enfant d’exprimer sa frustration et d’entendre sa colère. Les larmes durent bien plus longtemps si on ne les respecte pas…

 

Une colère bénéfique ?

Il faut distinguer :

  • les colères d’un enfant devant les frustrations qui sont le fait de la rencontre avec la réalité,

 

  • la colère que l’enfant a be­soin d’exprimer à l’égard de ceux qu’il aime pour les sentir et se sentir exister en les voyant survivre à son agressivité. Ce type de colère ne se satisfait pas de réponses verbales : les mots la renforcent, ne lui répondent pas. En mobilisant le corps, elle pose la question du lien entre corps- ressenti – pensée. Cette colère doit être reçue sans représailles par le parent pour être en retour reconnue pour ce qu’elle est et permettre la construction de ce lien harmonieux par l’enfant. Alors la colère peut devenir constructrice et donc, bénéfique.

La coopération plutôt que l’affrontement émotionnel

« Ils sont insupportables ! » signifie que vous ne supportez plus, que VOS limites sont atteintes. Mais comme tout un chacun, vos limites varient selon les jours… Comment votre enfant peut-il connaître le curseur ?

En tant qu’adulte il est donc essentiel de s’écouter et reconnaître ses propres besoins pour qu’ils n’entrent pas en compétition avec ceux de ses enfants : la coopération est plus efficace que la compétition émotionnelle.

Les limites que nous devons poser, ne sont-elles pas (trop) souvent dictées par nos besoins et non par ceux de nos enfants ? Rappelons-nous que si l’enfant n’a pas la possibilité de contrôler ses pulsions, l’adulte, lui, en est capable. Être parent c’est parfois accepter de mettre de côté transitoirement ses propres besoins pour entendre ceux de ses enfants.

L’enfant est un révélateur

C’est le soir où je suis le plus énervé qu’il fait des colères ! 

L’enfant est un révélateur des tensions ou émotions non dites, non reconnues, non assumées de leurs parents. Il les capte et réagit par des comportements qui vont provoquer la libération des émotions parentales. Si la dépres­sion est un mécanisme pour éviter la mise en actes, l’expression de la colère peut, elle, restaurer la relation.

Vous êtes leurs modèles !

L’enfant observe les actes et les réactions de ses parents face à la vie et les imite : ils sont leurs modèles. Tout comme il transmet le respect des règles, le parent  autorise  l’expression des émotions et des sentiments en les exprimant lui-même, de manière adaptée bien sûr…Car les enfants observent si et comment chaque parent exprime ses émotions. Montrer à l’enfant que l’expression des colères ne détruit ni la relation ni les personnes est essentiel.

Lorsqu’un parent me fait part avec inquiétude de l’absence de partage d’émotions ou d’expressions de son enfant (« il ne me dit rien ! ») je lui demande : « et vous, qu’exprimez-vous devant votre enfant ? »

Un enfant n’exprime que ce qu’il a le droit d’exprimer. S’il perçoit qu’il est plus confortable pour l’adulte de ne pas exprimer, il se replie sur sa souffrance et « s’insensibilise ».

 Cette photo vous dérange ?

Elle permet de mieux comprendre l’impact d’une répression des émotions chez un enfant.

Ne pas réprimer mais accompagner la colère

Un grand nombre d’injonctions dans l’éducation que nous donnons aux enfants, comme « arrête de pleurer », « sois sage », « tiens-toi calme », «ça suffit», réprime des émo­tions qui demandent à s’exprimer. Les émotions comme la colère peuvent de ce fait être perçues par l’enfant comme n’ayant pas droit d’exister, créant alors des clivages entre son corps et son ressenti.

Réfléchissons à la manière dont nos comportements sont dictés par notre propre éducation, de générations en générations, des automatismes dont nous ne savons même plus l’origine

Pour se livrer, l’enfant a besoin d’avoir la certitude d’être entendu et accepté sans jugement.

  • Il fait des colères à la maison ? Tant mieux ! C’est qu’il vous fait suffisamment confiance et qu’il se sent en sécurité pour libérer ses émotions sans en avoir peur. 
  • Il fait des colères à l’extérieur ? Si le regard des autres vous culpabilise, pensez à ce qui est le plus précieux pour vous. Un enfant qui se sent précieux se montrera plus attentif à autrui et aux conséquences de ses actes.

Si vous avez omis d’anticiper et de préparer l’enfant à une situation (aller au supermarché par exemple, bel exemple de lieu de stress pour un enfant), le simple fait de reconnaître son besoin en le verbalisant peut l’apaiser : « ah oui tu voulais ces bonbons, je comprends, c’est vrai qu’ils sont très jolis, préfères-tu les roses ou les bleus ? Tu te souviens la dernière fois que tu avais été à la fête de ? » …etc… 

côté pratique ?

Les colères de l’enfant sont parmi les plus violentes et les plus difficiles à contenir. Elles ne sont pas uniquement des débordements :  elles manifestent, appellent, et obligent finalement à se poser après un éclatement. Les effets néfastes de la censure de la colère, sont bien connus : elle enferme l’enfant (comme l’adulte) dans les zones de non-dit et parasite sa relation à lui-même. Il est donc préférable d’apprendre à l’accueillir.

L’enfant a besoin de sentir la solidité émotionnelle, psychique et corporelle de ses parents lorsqu’il vit cette émotion.

  • Adaptez votre posture, votre regard et votre toucher à l’âge de l’enfant
  • Mettez des mots sur ce qu’il ressent « tu es en colère, tu es très fâché… »
  • Permettez à l’émotion d’aller jusqu’à sa résolution avec son corps (pleurs, cris, coups de poings sur un coussin…)
  • PUIS laissez la place à la parole de l’enfant en l’accompagnant avec des questions simples (pas de « pourquoi ? », trop complexe pour un enfant) : « qu’est-ce qui se passe ? Qu’est ce qui t’embête ? Que ressens-tu ? »  Ensuite, demandez-lui « que pourrais-tu faire pour te sentir mieux ? », « est-ce que je peux t’aider ? »

Si l’enfant se roule par terre dès qu’il est frustré, enchaîne les colères et les gestes agressifs, il s’agit peut-être d’un TOP : un trouble oppositionnel avec provocation. C’est un trouble psychique reconnu depuis quelques années qui fait référence à un comportement d’opposition systématique. On parle de TOP quand les colères sont extrêmes, régulières, que l’enfant est hors de lui sous l’effet d’une énorme décharge d’adrénaline. Quand la crise est là, Il faut prendre l’enfant dans ses bras pour le contenir, tout en gardant soi-même son calme afin de mieux l’apaiser. Il est en nage, il pleure avant de s’apaiser peu à peu. Dans ces cas précis, il est important de consulter pour vous faire aider.

La meilleure réponse face à la colère est l’empathie. Si vous comprenez ce que l’enfant exprime, alors vos réponses seront adaptées. L’important est d’accueillir l’émotion d’un enfant sans chercher à solutionner le problème immédiatement, sans jugement. En validant ses sentiments et leurs expressions, vous lui permettez de se construire et d’exister en tant qu’individu à part entière, dans sa vérité.

LD

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